JUSTICE : JOURNALISTE PHOCAS NDAYIZERA, L’USINE DES FAUX TÉMOINS A TOURNÉ

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Ce mercredi le 5 février 2020[1], avait lieu la poursuite des audiences du procès dit du journaliste Phocas Ndayizera et ses 12 co-accusés à Nyanza, province Sud au Rwanda. C’était au tour des trois accusés de présenter leurs défenses. Eliakim Karangwa, le premier à s’exprimer, est revenu sur ses aveux qu’il a dit avoir confessés suite « aux conditions dans lesquelles il était ». Il a raconté que le bureau rwandais de la police judiciaire, le RIB, lui a aussi demandé de charger le journaliste Phocas Ndayizera en lui promettant qu’il sera libéré en contrepartie. Un seul des trois accusés, Patrick Niyihoze, a admis avoir été en contact avec Cassien Ntamuhanga.

Dans la section de lutte contre le terrorisme du tribunal de Nyanza, les faits évoqués par d’Eliakim Karangwa, un expert en technologie sont venus s’ajouter à la longue liste des aveux obtenus sous la contrainte ou à la liste de fabrication des fausses preuves pour inculper les innocents rwandais.

Le RIB lui a demandé lors de l’investigation de charger le journaliste Phocas Ndayizera en admettant qu’il devait aider ce dernier à fabriquer les explosifs à partir des pièces détachées comme la mèche ou autres pièces. Phocas Ndayizera, qui lui aussi est revenu sur ses aveux obtenus sous la torture lors de l’audience précédente, était supposé avoir ces pièces sur lui selon les dires du parquet. En contrepartie la police judiciaire rwandaise  avait promis à Karangwa de le libérer.  Sa version des faits c’est que Ndayizera et lui voulaient monter un projet pour fabriquer un engin agricole pour arroser les  champs et fabriquer les engrais. L’acheteur était un Kenyan qui leur avait fait une avance de frais de 600 USD sur les 1500 USD que nécessitait le projet. Pour le RIB cette somme provenait de Cassien Ntamuhanga, journaliste et ancien prisonnier politique rwandais, qui vit à l’exil depuis son évasion d’une prison rwandaise. Aussi Ntamuhanga est à ce jour le coordinateur d’Abyaryankuna – Alliance Rwandaise pour un pacte national.

Si Eliakim Karangwa avait accepté d’avouer c’est parce qu’il savait pertinemment qu’il pourra prouver la provenance de l’argent devant le tribunal.  Il a aussi raconté avoir fait ces aveux sous la contrainte car il était désorienté (interrogé dans un endroit où il ne savait pas où c’était) et avec des yeux bandés. Il convient de rappeler ici que les douze co-accusés de Phocas Ndayizera sont restés portés disparus, sans que leurs familles ne sachent où ils étaient pendant un mois. Ils ont fini par réapparaitre par miracle à la première audience publique du journaliste.

Pour l’avocat d’Eliakim Karangwa  le procureur n’a aucune preuve démontrant que Ndayizera et Karangwa avaient un projet de complot contre le pouvoir en place ni celle qui établit un accord avec Ntamuhanga.

Un seul des trois accusés qui ont pris la parole à l’audience, Patrick Niyihoze, a admis être entré en contact avec Cassien Ntamuhanga. Depuis que le journaliste était parti à l’exil, il le téléphonait pour lui demander de rassembler d’autres jeunes pour qu’il les aide à trouver du travail. Il a été arrêté lorsqu’il s’était rendu à Nyagatare situé près de la frontière ougandaise, pour rencontrer un Ougandais. C’est Ntamuhanga qui lui avait mis en contact avec l’Ougandais.  Pour  la police judiciaire il allait « être amené dans la rébellion de la RNC (parti politique d’opposition qui exerce à l’exil) ».

Phocas Ndayizera  et ses co-accusés sont les membres d’Abaryankuna. Au Rwanda l’opposition politique est interdite et Abaryankuna est un mouvement de résistance politique.  C’est donc leur engagement politique qui leur vaut d’être poursuivis. Une des craintes du FPR, le parti unique de Paul Kagame au pouvoir depuis plus de 25 ans, est que les Rwandais finissent par se révolter et demander le respect de leurs droits fondamentaux. Ainsi régulièrement les jeunes engagés dans la politique sont arbitrairement arrêtés et emprisonnés, assassinés ou portés disparus.

La prochaine audience est prévue pour début avril 2020.

Pour en savoir plus sur ce procès :

Rwanda : Procès du journaliste Phocas Ndayizera

Rwanda : Journaliste Phocas Ndayizera, il plaide non coupable

Journaliste Phocas Ndayizera, les explosifs sont analysés depuis plus d’un an


[1] https://youtu.be/psPj9J2tXXw